Just For Words [PV Bradi']

What is mean ?

Seïten

"- Bonjour Seïten, comment vas-tu ?"

Pour une fois, je remerciais la fraîcheur de la plage en soirée d'être là. Elle me faisait du bien, vraiment. Surtout que j'étais plutôt...Tendue. Et pas qu'un peu. Il venait simplement de m'adresser la parole, et j'étais déjà dans tous mes états. Intérieurement. Je ne dois sans doute pas préciser que je serais facilement passée pour une imbécile si j'aurais paniqué et démaré au quart de tour. Non. J'allais bien. *Hé ho, Seïten, casse pas tout comme ça, on dirait une timbrée*. Voilà ma pensée. Fameux, non ? Bradigan ne m'avait parlé que de très rares fois. Et j'exagère peut être légèrement. Si ça se trouve, je me fesais un peu des délires dans ma tête, je ne lui avais peut être jamais parlé en fait. C'est pour ça que j'étais heureuse de l'entendre m'adresser ces quelques mots, même si ce n'était qu'un simple bonjour de coéquipiers faisant partie du même clan. Au départ, un court instant après que je l'eus remarqué, j'avais eu l'impression qu'il allait de nouveau passer son chemin, et qu'il faisait mine de ne pas m'avoir vue. Pour dire, il fallait vraiment être un aveugle pour ne pas me remarquer - une tâche blanche couchée en plein milieu de la plage. D'une part, ça m'amusait un peu cette petite attitude négligente, ça me rappelait légèrement quelqu'un. Mais d'un autre côté, ça m'attristait terriblement. Après ce qui s'était passé avec le véritable Ryu, c'est-à-dire des meurtres, pleins de chats avaient eu vent de mon existence et du secret qui m'habitait. Je m'étais vue rejetée tant et tant de fois. Je sais que je ne suis pas la seule à qui cette discrimination est arrivée, mais ça continue un peu maintenant parfois. La question qui taraude mon esprit comme tant d'autres reste "Pourquoi ?". Si peu de félins m'adressent la parole. Je voudrais tellement ressembler aux autres et être beaucoup plus sociable mais je n'y arrive pas. Au début, quand je suis arrivée à Autre Monde, je voulais ressembler à Jokeï et à Célestia aussi. Je les trouvais sublimes. Et Célestia était d'une beauté pure et rare. Tant de chats sont charismatiques et beaux parleurs, mais quoique je fasse, je finis toujours par trébucher et m'écrouler piteusement dans la poussière. Je ne pourrais jamais ressembler aux autres, alors j'ai fini par me faire une idée de la réalité : Je suis ce que je suis et je dois m'accepter ainsi. Mais c'est trop dur. Mon père adoptif, Kaoûmi, m'a souvent répété qu'on ne voit que les qualités des autres. Il a dit que si Dame Nature nous avait faits ainsi, c'était pour que l'on aprenne à mieux apprécier son prochain et voir les belles choses chez lui. Il répétait aussi qu'on ne voit que nos défauts. Il en est arrivé à déduire que si nos propres qualités ne se montraient pas à nous, c'est qu'elles étaient dans notre dos. Il m'expliquai souvent ceci en assimilant les qualités à une fleur de cerisier qu'il posait sur la fourrure blanche et grise de mon dos. Je me rappelle qu'il venait derrière moi et s'exclamait : "Ah, Seïten ! Cette fleur est magnifique, tu as tant de qualités inexploitées, mais je t'apprendrais à avoir confiance en toi et ne jamais reculer devant le bon savoir des autres !". Et jamais il ne m'a apprit à m'apprécier.

Mais la réalité restait néanmoins la même, Bradigan était désormais face à moi, et il n'attendait plus que ma réponse. Je ne le regardais pas. J'avais honte de moi puisque c'est le sentiment que tant de félins ont choisi d'avoir à mon égard. Alors je fais de mon mieux pour les suivre, puisqu'ils ont sûrement raison. Malgré ça, mes prunelles d'ambre foncé pivotèrent lentement mais surement vers la forme familière qu'était Bradigan. Si il avait été un simple petit chaton, je lui aurais certainement fait peur. Seuls mes yeux brillants animaient ma silouhette fine sur la plage de sable fin. Je n'étais pas face à lui, et je l'observais seulement de côté. Je le faisais tout le temps. N'importe qui aurait pu croire que j'étais une féline agressive en me voyant ainsi, mais ce n'était nullement mon intention de parraître comme ça. Je ne savais pas quelle expression adopter. Et je rencontrai son regard incandescent. Etrangement, une expression de sympathie animait ses prunelles de braises qui avaient le don de me réchauffer le coeur. Et je restai ainsi, silencieuse dans ce puit envoûtant. Je n'osais pas briser ce silence ponctué par le glissement des flots salés sur le sable finement taillé par une certaine Vénus. Mais cette dernière remonta en Conque, et je fus seule à nouveau devant des mots sans portée. Durant un court instant, il parut vouloir continuer, mais aucun son ne franchit ses canines blanches.Il avait légèrement penché sa tête de côté, et un petit sourire rassurant fendait son museau sombre. Il paraissait un peu gêné, mais je ne savait pas pourquoi. Enfin, si, je savais à peu près. Les autres sont souvent comme ça face à moi. Je ne suis peut être pas assez...Bien ? La suite des évènements et ce que je dis parut certainement étrange à tous les points de vues, mais je m'en fichais un peu. Je voulais être naturelle, rester celle qu' j'avais été, et parler à Bradigan comme à un ami auquel on se confie.

- Je vais bien, Bradigan, merci. Dis-moi, j'ai besoin de savoir quelque chose. Est ce que toi aussi tu crois qu'on n'aperçoit que les qualités des autres ? Que seuls nos défauts nous sont exposés ? Tu me me répondre franchement, et n'hésite pas à me dire si je t'ennuie, j'ai l'habitude tu sais.

C'était comme ça que j'étais réellement. Une personnalité acerbe en surface, mais meurtrie au fond. Malgré tout, le ton avec lequel je lui avais parlé n'était pas agressif, au contraire. Il était calme et posé, et peut être avec une petite pointe...malheureuse, au fond ? J'étais comme ça. Et je m'habituais petit à petit à être celle que j'étais, et éviter d'envier les autres. Mais les êtres ont été faits comme ça. Pourquoi ne peut-on pas s'empêcher d'envier ? Moi, je ne peux pas répondre à cette question. J'en fais partie, en tant que "victime". Je me rendis compte bientôt que ma réponse n'était pas celle que devait attendre Bradigan. Tout de suite après avoir prononcé ces quelques mots, je me sentis maladroite, terriblement maladroite...J'eus presque envie de bloquer le temps et de m'enfuir. C'est peut être pour ça que certains ont peur de moi ou ne me font pas confiance. Parceque je peux faire beaucoup de choses derrière leur dos, sans qu'ils le sachent. Je m'en veux d'être comme ça. Si, au Japon, mon père adoptif était si gentil avec moi, c'était parcequ'il ne connaissait pas mon secret. Il ne savait pas que j'avais ce pouvoir. Parfois, je me dis que je n'ai jamais connu ma vraie famille. Qui étaient-ils ? Pourquoi n'ai-je aucun souvenir d'eux ? Peut être m'ont-ils rejetée à cause de ce pouvoir embarrassant, eux-aussi.

[Je le trouve bien moi, et ce qui compte, c'est surtout la qualité, non ?;D]

Don't Remember

Bradigan parut se perdre dans ses pensées un court moment. Pendant un instant, je crus qu'il n'allait pas me répondre et continuer sa route sans terminer cette discution, et je me mis tout de suite à culpabiliser. Je n'avais rien d'autre à faire que de l'embêter avec mes questions idiotes ! *Seïten, tu es vraiment plus que maladroite..!* Mais il choisi de répondre, et d'une voix amicale :

"- Non, tu ne m'ennuies pas du tout. Mais tu sais, tu ne devrais pas te poser des questions pareilles. Tu es parfaite et ne laisse pas tes pensées dire le contraire !"

Sur ce coup là, on pouvait dire que j'étais réellement étonné. Si j'avais été un bipède, mes joues seraient devenus aussi rouges que les étranges fruits que nos ennemis sur deux pattes cultivent. Je détournai le regard aussi vite que je pus et observai méticuleusement les grains de sable presque blancs. *Je suis parfaite, il m'a dit ça ! C'est impossible, Seï, tu dois probablement rêver, je suis sure que tu vas te réveiller !* Je me parlais à moi même. Qu'est ce que je pouvais lui répondre à ça ? Un piteux petit "merci" ? Au fond de moi, j'étais véritablement heureuse. Seul Kaoûmi m'avait dit ça, une seule fois. Depuis, plus aucun mot de ce genre, sauf avec Ryu. Sinon, le reste avait été ponctué de "Tu es ennuyante, tu sais ?", "Tu ne voudrais pas me laisser tranquille, j'ai d'autres choses à faire !", et tous les mots de ce type. Et là, quelqu'un d'autre me faisait un compliment. En plus, c'était Bradigan. Je ne pus retenir le bref ronronnement qui m'échappa. Le soleil couchant projetait ses rayons chaleureux sur la plage de sable fin, et je me sentais bien. Le fait que quelqu'un presque inconnu avec qui je n'avais parlé me dise ces mots semblait même me rassurer, me donner une importance à moi-même, comme pour me convaincre que moi aussi je pouvais être quelqu'un, moi aussi je pouvais avoir une vraie vie. Mais les bons moments finissent bien plus vite que les mauvais, c'était pertinemment connu. Mon regard à la teinte d'écorce de cerisier se perdait dans l'horizon infini, où régnait paisiblement une mer peinte d'écarlate par le soleil couchant. Cette couleur rappelait le sang, et le sang avait souvent le don de rappeler les passés douloureux que la plupart des chats du même clan que moi avaient. Nous étions tous spéciaux. Nous avions tous notre petit secret à nous. J'aurais bien aimé bloquer le temps. Sans raison, juste comme ça. Simple manière d'évacuer mon stress et mon énergie trop vite accumulée. Mais c'était lâche. Ce pouvoir me donnait une attitude lâche aux yeux des autres. Ils devaient surement croire que je leur avait fait un mauvais coup sans qu'ils sachent. Mais je ne pouvais pas faire ça. J'étais bien trop gentille et franche pour agir de cette façon. Mes iris se reposèrent sur la toison charbonneuse de Bradigan.

- Merci. Dis...C'est vrai que certains disent des choses de moi, est ce qu'on raconte que je bloque toujours le temps pour vous faire des sales coups derrière votre dos ?

Voilà, j'avais posé cette question. Et en même temps, j'étais revenue au piteux "merci". Mes pattes blanches tachetées de gris formèrent de petits sillons dans le sable blanc, traces que je venais de produire en me relevant. Je me tenais à présent debout, ancrée sur mes quatre pattes face à lui. Mais une expression légèrement triste restait sur mon museau. Néanmoins, je me sentais à présent mieux avec Bradigan, j'avais l'impression que j'arrivais mieux à me confier à lui maintenant qu'il m'avait dit ce que mes connaissances proches m'avaient énoncé dans mon passé. Je paraissais toujours déplorable face à tout le monde, surtout avec mon caractère, car sans me mentir, j'étais plutôt fière de mon pelage et de mes yeux noisette. C'était peut être ça qui gênait constamment les autres. Mon habitude de toujours me plaindre de tout et m'excuser après chacun de mes faux pas, si petit soit-il.

[Désolée du retard !!]

I know

"- Bah, tu sais. Les gens font souvent des erreurs. J'ai moi-même pensé ça, avant.."

Il avait rapidement agité sa queue d'un air embarrassé. D'un certaine façon, sa réponse me plut, même si ses mots me firent mal au coeur. Je préférais qu'il soit franc et direct plutôt qu'il tente de cacher la vérité sous des phrases idiotes du style "Mais non, tu sais, pourquoi je penserais ça, et tout le blabla". Mais son comportement était étrange. Ce n'était tout simplement pas normal. Je sentais que son air n'était pas totalement naturel. Son ton était emplit de mélancolie, mais pourquoi ? Je voulais tout sauf ça. Comme si j'avais voulu inspirer de la pitié...Sa réaction me déplut, mais je savais que mes paroles paraissaient être celles d'une chatonne plaintive. C'était stupide. Et pourtant, je ne le voulais pas. *Ah, mais pourquoi est-ce que je réagis toujours comme ça ?! Je ne peux pas être normale, naturelle ?*C'était vrai, je faisais toujours tout "à côté de la plaque". Je ne savais pas trop quoi faire. J'étais timide et maladroite. Je fus vraiment surprise lorsque je vis ses muscles se crisper sous sa toison charbonneuse. Qu'avait-il ? Est-ce que je l'avais énervé ? Bon sang...Bradigan non plus n'était pas des plus faciles à comprendre. Il avait l'air tendu, presque atterré. Je ne comprenais pas grand chose à ce qu'il venait de lui arriver, mais je restai bien campé sur mes quatre pattes, continuant de l'observer de mon regard d'ambre. Il recula soudainement d'un pas, comme honteux de sa propre réaction. Son regard de feu semblait chercher une issue, mais il se posa finalement sur moi.

"- Désolé. Crise de Spasmophilie dut à un manque de magnésium. "

Aha, très drôle. Comme si j'allais croire ces idioties débitées sur un coup de tête. Néanmoins, je voyais que Bradigan était assez troublé, et espérait quelque chose. Quand je suis arrivée à Other World, ce matou noir faisait déjà partie du groupe. A l'époque, j'étais déjà refermée sur moi-même, dans ma bulle impénétrable que personne ne saurait briser. Je regardais le monde de ma propre complexité, et je ne voyais qu'un chat bien intégré aux autres, et plutôt...apprécié. Et j'étais tombée dans le panneau. Je m'étais tout de suite imaginé qu'il était quelqu'un de très connu, de respecté de tous, de "sympathique" ou même ténébreux. Et les rares fois ou son regard se posait sur ma frimousse pigmentée d'argent, c'était moi qui choisissait de détourner les yeux. Et à chaque fois, une voix me répétait dans ma tête qu'il ne regardait que la personne qui était derrière moi. J'étais presque invisible. Non, je me convainquais à être transparente aux yeux des autres. Mais j'avais continué à le regarder lorsqu'il passait devant moi. Et son allure était toujours majestueuse, même quand ses yeux étaient occupés par la rage ou l'incompréhension. Je voulais lui ressembler. Non, je voulais ressembler à l'image que je m'étais faite de lui. Et là, sur la plage, j'avais l'impression de parler à quelqu'un d'autre que Bradigan. Mes jugements trop pressés et mon renfermement n'est pas une façon de découvrir le monde et de connaître les autres, je le savais pertinemment, et pourtant, je restais seule dans mes rêves. Maintenant, Bradigan me paraissait plus naturel, sans vraiment que je sache pourquoi. J'avais peut être le don de troubler les esprits, mais là, je savais que la silhouette en face de moi avait lancé ça au hasard comme échappatoire. Je baissai la tête avec amusement vers les grands de sable blanc, tandis qu'un petite sourire marqua mon expression.

- Ton comportement est assez contradictoire. Es-tu franc ou non ? Tu m'avoues toi-même que tu avais aussi des préjugés sur moi, ce qui est une part de vérité. Et là, tu m'inventes une crise de je ne sais trop quoi. Je sais que c'est mensonge, en même temps, n'importe qui l'aurait vu. Je te dérange tant que ça ?

Le ton que j'avais adopté n'était pas doux et repentant, il était normal, et coulait à un rythme régulier. J'avais "jeté" une petite part de ma timidité, et lui parlait d'une façon qui restait calme et posée. Je le regardais droit dans les yeux, tout en observant ses iris de feu. Je n'avais pas vraiment eu l'occasion de bien les détailler. A des endroits, la couleur partait en dégrader, et semblait même bouger. On aurait presque pu entendre le crépitement d'un feu. C'était si beau...Son regard me réchauffait le coeur, même si son comportement laissait un peu à désirer pour le moment. Peut être ne savait-il tout simplement pas comment réagir ? Je pouvais largement être indulgente avec lui. Je ne pouvais pas lui faire de reproches, surtout une personne comme moi. Je ne savais pas trop ce qu'il allait faire. Enfin, si, je savais une chose maintenant : C'est qu'il ne partirait pas avec un air ennuyé.